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mardi 31 janvier 2023 Mis à jour le 31 janvier 2023
Dans le cadre de la loi Climat et résilience de 2021, de nombreux acteurs de la transition écologique et énergétique et du monde social se sont fortement mobilisés en faveur de l’interdiction de location des passoires énergétiques.
Depuis le 1er janvier, les logements considérés comme les pires passoires énergétiques de la classe G sont désormais interdits à la location.
Les effets positifs de ce premier pas vers l’interdiction de location des passoires énergétiques se font déjà ressentir car plus de 30% des propriétaires bailleurs se disent prêts à rénover leurs logements, un niveau jamais atteint auparavant.
Conformément au décret paru au Journal officiel le 13 janvier 2021, le seuil maximal de consommation d’énergie finale d’un logement est désormais fixé à 450 kWh/m2/EF pour la France métropolitaine. Avec cette interdiction, l’objectif du Gouvernement est d’inciter doucement les propriétaires bailleurs à rénover. Cette mesure reste néanmoins symbolique car elle concerne en réalité à peine 2 % de l’ensemble des logements en location selon l’Observatoire national de la rénovation énergétique.
Cette deuxième étape de mise en œuvre de la loi complète une première mesure de blocage des loyers des passoires en location en vigueur depuis le mois d’août 2022. Mais les interrogations restent encore nombreuses quant aux effets réels pour les locataires et les propriétaires bailleurs. Comment ces mesures vont-elles être réellement appliquées ?
Quatre mois après l’interdiction de dépasser le gel des loyers pour les logements passoires, de nombreuses annonces frauduleuses continuent d’être publiées chaque jour, sans susciter aucune réaction.
Les communications portant sur les risques pour le marché locatif se multiplient bien souvent sans démonstration autre qu’un ressenti alarmiste. Au contraire, le renforcement des normes de décence des logements n’a jamais conduit à une dégradation de l’offre locative, bien au contraire. Il semble un peu gros de faire porter la cause d’un correctif de valeur immobilière à la fixation très progressive de standards de performance énergétiques minimums dans le logement, ou à la réglementation en général. La bulle immobilière, qui subit actuellement un léger dégonflement, est créée par des années de politique monétaire accommodante. Nous assistons tout simplement à une bulle qui se dégonfle, rien de plus.
L’objectif de ces communications est d’obtenir de la part des pouvoirs publics de multiples dérogations pour les propriétaires bailleurs de logements en collectif. La rénovation des copropriétés est pourtant un impératif social et climatique, et dans la perspective d’élargissement de ces interdictions aux classes F et G en 2025 et 2028, les décisions doivent être prises rapidement.
Il est indispensable de rappeler que l’interdiction ne concernera que les nouveaux baux, et donc que l’accès aux droits des locataires concernés prendra du temps, si tant est qu’ils s’en saisissent ou qu’ils les connaissent, ce qui est loin d’être évident. L’enjeu est donc aussi de pouvoir informer, sensibiliser les locataires à leurs droits concernant la loi, et mettre en avant les dispositifs de médiation, qui joueront un rôle important dans la réussite de mesure. Cette question de l’appréhension de l’interdiction vient avec celle du nouveau DPE car encore beaucoup de locataires n’ont qu’un DPE vierge et ne voient pas comment la nouvelle interdiction s’appliquera, quelles seront les obligations avec le nouveau DPE et s’ils peuvent l’exiger ? Autre point sur le DPE qui n’aide pas à la lisibilité pour l’ensemble de la population : le DPE est exprimé en énergie primaire alors que le critère d’interdiction est quant à lui exprimé en énergie finale jusqu’à janvier 2025.
En 2023 les propriétaires bailleurs du parc de logements privés ont de nombreux droits qu’ils peuvent activer en vue de satisfaire à cette nouvelle norme sociale et environnementale salutaire. A titre d’exemple le doublement du déficit foncier pour les travaux de rénovation, le passage de 15 à 25 000 euros des travaux subventionnables par MPR Copro, sans compter l’actuelle dérogation en copropriété si l’AG bloque la réalisation des travaux, et celle qui prendra effet en 2025 concernant l’impossibilité de travaux liée aux contraintes architecturales ou patrimoniales. Autant d’outils qui permettent d’opérationnaliser la loi coté bailleurs, même si pour les plus modestes, qui ne sont pas la majeure partie, il faudrait pouvoir leur proposer les mêmes aides et accompagnement que les propriétaires occupants.
“En ne permettant pas une lecture simple de la mesure, le risque est d’amplifier l’incompréhension et la défiance des propriétaires bailleurs.” commente Danyel Dubreuil, coordinateur de l’Initiative Rénovons au CLER-Réseau pour la transition énergétique, avant d’ajouter “cette interdiction est un levier pour la rénovation énergétique et donc une opportunité pour les propriétaires bailleurs, les entreprises de travaux, les pouvoirs publics et la société dans son ensemble, à commencer par les locataires avec la baisse des factures énergétiques et l’amélioration du confort de vie.”
L’initiative « Rénovons ! » est une vaste alliance regroupant les forces vives de la société civile en France, au sens large, engagées en faveur de l’efficacité énergétique grâce à la rénovation énergétique des logements en France. La rénovation des logements, particulièrement les moins performants sur le plan énergétique, doit permettre de résorber structurellement la précarité énergétique.
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