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[Presse] Communiqué - MaPrimeRénov’ : Encore loin du compte pour les rénovations globales performantes et l’aide aux plus modestes

mercredi 7 octobre 2020 Mis à jour le 7 octobre 2020

Alors que les député-e-s débattent du Projet de loi de finances pour 2021, les nouvelles aides MaPrimeRénov’ pour inciter à la rénovation énergétique des logements sont présentées dans un contexte de relance marquée par une crise sanitaire exceptionnelle et l’aggravation de la précarité énergétique. Ces offres sont-elles à la hauteur des besoins identifiés pour la rénovation des logements et poursuivent-elles aussi sincèrement des finalités écologiques et sociales ?

Des volumes d’aides en augmentation, mais qui restent insuffisants

A l’occasion de sa dernière étude, l’Initiative Rénovons estimait à au moins 3,2 milliards d’euros chaque année pendant vingt ans les besoins d’investissement minimum pour rénover les seules passoires énergétiques. Puisque celles-ci représentent 20% du parc de logements privés, alors les 5 milliards d’euros maximum d’aides proposées cette année restent très largement insuffisants pour atteindre le rythme d’investissement nécessaire à long terme.

L’incohérence entre les objectifs et les moyens persiste

La France doit rénover d’ici 2050 la totalité de son parc de logements au niveau Bâtiment Basse Consommation (BBC 80 kWh/m².anEP), soit près de 30 millions de logements, dont au moins 5 millions de passoires énergétiques, selon les dernières estimations du Ministère de la Transition Écologique.
Les nouvelles offres MaPrimeRénov’ ajoutent de la complexité (nouveaux forfaits, multiples bonus, 4 catégories de ménages avec effets de seuils importants), au lieu de simplifier et de rendre plus lisible le “maquis” des aides.
Il semble peu probable qu’avec une telle complexité, nous puissions obtenir un changement d’échelle de la rénovation énergétique des logements et une baisse à long terme de la précarité énergétique en France.

Le dispositif pourrait ne pas améliorer le sort des ménages modestes

Pour les ménages à faibles et très faibles revenus, rien ne change par rapport à 2020 (Habiter Mieux et barème des aides MaPrimeRénov’), hormis l’aide assez modeste à la sortie du niveau “Passoire Énergétique” (1500 euros) et l’aide à l’atteinte du niveau BBC (1500 euros, très hypothétique pour les ménages à faibles revenus).

Le gouvernement a choisi de ne pas lever l’insurmontable obstacle financier pour les ménages les plus précaires, en refusant d’autoriser un reste à charge proche de zéro pour ceux-ci plutôt que de renforcer les contrôles qualité sur les travaux effectués. En effet, le reste à charge de 10% du coût total annoncé pour les plus modestes ne concerne que certains gestes, et n’est pas possible pour une rénovation globale et performante. Le Programme Habiter Mieux ne permet pas d’atteindre ce niveau puisque la subvention maximale est de 19 000 € pour 30 000 € de travaux.

De la même manière, en copropriété, le choix d’accorder le même niveau d’aide à tous les copropriétaires, quel que soit leur revenu, aboutit à des niveaux d’aides bien trop faibles pour les ménages modestes. Ainsi, un ménage aisé en habitat individuel pourra obtenir jusqu’à 11 000 € d’aides, contre 6750 € pour un ménage modeste dans une copropriété fragile, pour des rénovations pouvant atteindre plus de 20 000 € par logement. Là encore, c’est insuffisant pour résoudre les freins à la prise de décision dans les copropriétés et pour inciter les propriétaires ou les bailleurs modestes à rénover.

Aucune conditionnalité écologique et sociale pour les propriétaires bailleurs

Il faudra réellement surveiller et contrôler très régulièrement l’évolution des demandes afin que le milliard annuel supplémentaire ne profite pas essentiellement aux ménages les plus aisés, ainsi qu’aux propriétaires bailleurs. Le risque “d’effet d’aubaine” est très élevé au regard des nouvelles offres présentées. Rien ne permet de dire que l’enveloppe de MaPrimeRénov’ ne sera pas utilisée principalement par les ménages aux plus hauts revenus comme c’était le cas pour le CITE.

Aucune condition sociale de type maintien de loyers ou interdiction d’éviction “forcée” des locataires n’est demandée aux propriétaires bailleurs, pas plus que l’obligation d’atteindre une étiquette énergie C au minimum pour tout acte de rénovation.

Le dispositif d’aide aux propriétaires bailleurs paraît excessif : trois logements autorisés par bailleur, cumul des aides MaPrimeRénov’ possible, CEE, déficit foncier, TVA 5,5%, aucune condition de revenus, aucune contrepartie sociale ou écologique.

Le dispositif n’incite pas suffisamment à des rénovations globales performantes au niveau BBC, particulièrement pour les ménages modestes, comme cela a été demandé par la Convention Citoyenne pour le Climat

Il encourage les rénovations globales, ce qui est une avancée, mais encourage très insuffisamment l’atteinte des niveaux de performances qui constituent nos objectifs collectifs pour le climat. 1500 euros de bonus BBC, ne constituent pas un moyen suffisant pour boucler un financement de ménages modestes et est superflu pour les ménages aisés qui n’ont pas besoin de cette aide supplémentaire.
La notion même de rénovation globale proposée par MaPrimeRénov’ diffère de celle proposée par la Convention Citoyenne pour le climat en cela qu’elle ne fixe pas l’obligation d’atteindre le niveau BBC.
De la même manière, le forfait de 150 € pour une assistance à maîtrise d’ouvrage est une bonne idée quand on sait que la recherche d’artisans, la comparaison de devis est très chronophage et peut être un frein évident à la réalisation de travaux. Mais quelle est son articulation avec le programme SARE ? Il est important que la définition de ce forfait soit précisée, pour aller vers le financement de l’accompagnement réalisé par les Espaces FAIRE.
C’est donc une nouvelle occasion manquée de lancer les ménages qui le peuvent et le souhaitent dans la demande de rénovation de grande qualité et de permettre aux entreprises d’accompagner ce mouvement en proposant des interventions à la hauteur de la demande.

Alors que le sujet de la rénovation des logements est au cœur des préoccupations sociales et environnementales et qu’il fait l’objet d‘une communication intense de la part du gouvernement, les parlementaires sont dépossédés de la discussion autour des aides. Cette situation d’hypercentralisation de la décision, sans aucun dialogue possible, ni politique ni technique, à un moment particulièrement important, implique d’une part un risque accru et malheureusement avéré d’erreurs d’appréciation ou de conception des dispositifs et une responsabilité politique totale du gouvernement.
Les parlementaires vont-ils protester contre une mise à l’écart d’un débat qui concerne près de 4 milliards d’aides “publiques” ? C’est souhaitable, afin de rendre réellement “l’aide à la rénovation énergétique des logements plus simple, plus juste socialement et plus efficace” comme l’écrit le gouvernement !

Contact presse : Danyel Dubreuil – Initiative Rénovons - Coordinateur
danyel.dubreuil(at)renovons.org // 01 80 89 58 38

@Renovons

Membres de l’Initiative Rénovons : Fondation Abbé Pierre - Secours Catholique Caritas France - Fondation Schneider Electric et Schneider Electric - Fédération SOLIHA Solidaires pour l’Habitat - Le Groupe Effy - CLER Réseau pour la Transition Énergétique - Réseau Action Climat France - Association Coenove - Solidarités Nouvelles pour le Logement – La Fondation Nicolas Hulot – la CFDT – France Nature Environnement -

Renovons

L’initiative « Rénovons ! » est une vaste alliance regroupant les forces vives de la société civile en France, au sens large, engagées en faveur de l’efficacité énergétique grâce à la rénovation énergétique des logements en France. La rénovation des logements, particulièrement les moins performants sur le plan énergétique, doit permettre de résorber structurellement la précarité énergétique.

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